Articles - 1985 - Karen Cheryl

Karen Cheryl, la Dorothée de la une

France-Soir – 24 décembre 1984

Elle sera, à partir du 9 janvier, l’animateur de « Vitamine » (TF1, 13hr40)

Ça bouge sur TF1. La chaîne d'Hervé Bourges ne cesse d'innover et profite de cette période de fin d'année pour tenter de satisfaire le plus grand nombre de téléspectateurs. Non seulement les adultes mais aussi les enfants.
Ainsi, à partir d'aujourd'hui, les petits pourront suivre « La Semaine enchantée » de Chantal Goya (12 h 30), mais aussi l'émission de Catherine Malaval « Destination Noël » présentée par Karen Chéryl.
Pour cette dernière, il ne s'agira pas d'une expérience de courte durée puisque, dès le 9 janvier, elle animera et présentera « Vitamines » (13 h 40), à la place de Mélanie et de Dominique. (« Il est très difficile de trouver des animateurs pour ce type de programme, explique Jacques Meusseau, responsable du département jeunesse sur TF1. Les émissions pour la jeunesse doivent se renouveler en tenant compte de l'actualité. Karen Chéryl revient au premier plan avec son film et a manifesté l'intention de s'adresser à un jeune public. Pendant l'enregistrement de « Destination Noël », nous avons décelé chez elle des dispositions pour s'occuper d'une émission du type de « Vitamine ». Antenne 2 a sa Dorothée. TF1 aura désormais la sienne avec Karen Chéryl.


Karen Cheryl réalise enfin ses rêves

France-Soir - 9 janvier 1985

Une Karen acidulée devient l'amie des enfants sur TF 1 et, du même coup, porte la concurrence à la petite fée d'A 2, Dorothée. Photo FRANCE-SOIR (Lucien Jacquinot)

L'OEIL rouge de la caméra, c'est tout un symbole pour Karen Cheryl, qui anime en direct à partir d'aujourd'hui (TF1, 13 h 40) le rendez-vous hebdomadaire des bambins et des teenagers « Vitamine ». Cette petite lumière la branche sur des milliers de foyers depuis dix ans. C'est sa pilule, son électricité : « En dix ans, je n'ai pas fait une émission amorphe. »
Karen est née avec la télé, en janvier 1975. Elle veut dire, avec le concours du petit écran. Sa première chance : « Les rendez-vous du dimanche « , avec Michel Drucker. Un chéri, chéri », comme dit sa chanson, un tube.


<< Merci Drucker >>
« C'est quelqu'un à qui je dois beaucoup. Il m'a toujours donné la main, m'a beaucoup appris, et avec lui, Jacques Martin. La technique, le métier, ce n'est rien si l'on ne fait pas passer ce que l'on a au fond du cœur. A la télé, le subterfuge ne tient pas longtemps. Si on triche, on perd son âme, on se vide complètement. »
Hyper-professionnelle, Karen n'a jamais triché. Pourtant, elle a bien failli s'épuiser dans le combat incessant du dernier titre à lancer. Miss Microsillon platine, « docile, obéissante », Karen chérie, disent les quatre-cinq ans, ne regrette rien.


Mon amie Dorothée
« Je me suis toujours trouvée en harmonie avec mon personnage professionnel. Mais je vis désormais au-delà de la promotion. Le mois de décembre 1984 est à marquer d'une croix. Tout a éclaté. Je réalise enfin mes rêves. Un premier film (« J’ai rencontré le père Noël ») et ma première expérience de la scène du 29 décembre au 2 janvier, sous le chapiteau du Champ de Mars, devant 45.000 personnes, un public varié, enthousiaste, chaleureux. Enfin mes débuts d'animatrice dans « Vitamine ». Il y a tout ce que j'aime dans ces après-midis : la comédie, le chant, la danse, l'improvisation du direct, si préparé fût-il. J'ai toujours voulu " tricoter " autour de la chanson, et j'attends aujourd'hui cette polyvalence dont je rêvais de chanteuse, animatrice et actrice. »
Karen découvre en marge du show-biz une vraie forêt enchantée », celle qu'elle portait en elle et ne parvenait pas à réaliser. Un changement de manager (et futur mari), et bientôt de maison de disques. Et le tour sera joué. L'objet est devenu sujet. On ne parle plus du produit Cheryl, on s'intéresse à ce que Karen produit énergie, spontanéité, fraîcheur qui éclatent dans un talent multiforme.
Pas si conventionnelle que ça, la petite Karen. Les téléspectateurs ont salué par un abondant courrier sa prestation dans l'émission de Jean- François Kahn sur la Révolution française, cet été, où elle jouait les Candide avec vivacité. Et on la sait dotée d'une jolie plume au trait acéré pour la poésie comme pour le dessin. De quoi redonner des couleurs à Vitamine qui perçait difficilement en face de Dorothée, la fée d'Antenne 2, l'une des meilleures copines de Karen...
« On ne se brouillera pas pour autant. La concurrence ne pèse rien devant l'amitié. Notre ambition dans « Vitamine » : offrir une émission plus stylisée, mieux rythmée et très acidulée, qui fera rire et vibrer les enfants et les adolescents. »
Et que la meilleure gagne !


Denis SOLIGNAC


Catch à quatre féminin…

Le meilleur – 5 janvier 1985

CHANTAL Goya, surnommée « l’idole des couches-culottes » déclarait récemment : « Je ne quitte jamais le monde des enfants ». Comme on la comprend ! Sans le filon inespéré que constitue son immense public frais émoulu des pouponnières, la carrière de cette chanteuse aurait sans doute tourné court au moment du reflux de la vague yéyé. Quand elle se met à fredonner, avec son air inimitable (sauf par Hervé Vilard dans « Carnaval » ) de croire encore au père Noël et au marchand de sable réunis "Bécassine c'est ma cousine » ou "Piou Piou petit poussin», qui se souvient encore que cette "madone des nourrissons» sévissait déjà comme twisteuse de première ?
Certainement pas ses fans en culottes courtes. Mais c'est tout à son honneur de s'être reconvertie avec succès dans le baby-sitting de music-hall, avec un rare bonheur dans l'art de langer en musique. Mais le filon enfantin était sans doute trop juteux pour qu'on la laisse toute seule l'exploiter. Désormais, Chantal Goya, tenante incontestée du titre de miss tube... de lait concentré, avec 13 millions d'albums vendus, a ses rivales. Trois pour être exact et qui ne sont pas des « sparring-partners » dans ce qui est en train de devenir un véritable match de catch à quatre.
Les trois autres challengers en jupons ne sont pas, en effet, des « tocardes » et « La Goya » aura fort à faire pour défendre un empire qu'elle s'est taillé à force de courage, de ténacité... et d'indifférence face aux mauvaises langues qui lui reprochent d'écumer les tirelires ! Parmi elles, la plus dangereuse est Dorothée qui, grâce à Antenne 2 qui lui ouvre la voie des ondes, a déjà vendu plus de 3 millions d'albums, s'est lancée dans les spectacles sur scène et compte bien refaire son retard avant longtemps. Pour elle : la jeunesse, un « look » un peu plus moderne et surtout sa présence sur Antenne 2. La télévision vend aussi efficacement la pâtée pour les chats que la bouillie pour les nouveau-nés !
En outsider de dernière minute, on peut mettre Karen Chéryl qui vient de se voir confier par TF1 une tranche horaire consacrée à ceux que les éducateurs appellent les « pré-ados ». Ce n'est déjà plus la couche-culotte, mais pas encore le jean et les santiags, encore que la belle Karen (dont. Soit dit en passant, la tête est aussi bien pleine qu'elle est bien faite) vienne de se placer en pole-position grâce à son film « j’ai rencontré le père Noël ». Une concurrente dangereuse donc, puisqu'elle a sur les autres l'avantage de pouvoir séduire aussi les papas qui se battront pour accompagner leurs rejetons aux spectacles qu'elle donnera.
La quatrième, c'est Douchka. Elle, son avantage, c'est peut-être l'hérédité d'une maman (Pascale Petit) et d'un papa (Gianni Esposito) qui savent ce que show-business veut dire. Douchka -qui vient de marquer des points avec « Mickey, Donald et moi » vise un peu plus haut (question tranche d'âge) que Chantal Goya. S'agit-il d'un pacte de répartition du marché (Tu les fais jusqu'à 9 ans, après tu me les laisses) ? Sans doute pas. Mais ça y ressemble...
Le règne de Chantal Goya est-il vraiment menacé ? Ce n'est pas sûr.
Le public enfantin est un fromage qui peut fort bien se partager en quatre !
I.M.


L’année de Karen Cheryl

Le Figaro – 9 janvier 1985

La chanteuse, dont la tête bien pleine contraste avec la banalité de ses chansons, anime « Vitamine » sur TF 1.


« Mon but, c'est la polyvalence », lançait déjà Karen Cheryl en 1980, après une première expérience de télévision dans "L'inspecteur mène l'enquête ». Depuis Karen Cheryl s'est efforcée de briser le carcan de chanteuse populaire dans lequel elle étouffait. Son alliée, la T.V. "grâce à qui elle a tenté d'enrichir son personnage, et de conquérir un nouveau public ». A vingt-sept ans, dix ans après sa première apparition, elle peut se vanter d'un beau parcours. Fille d'agriculteurs, Isabelle Morizet est une passionnée de…batterie ! Elle suit régulièrement les cours de Kenny Clarke et Dante Agostini, tout en poursuivant des études secondaires que clôture un bac C brillamment décroché. Jusqu'au passage du producteur Ibach dans les studios. Elle commence alors une première année de médecine et n'a que dix-sept ans. Entre deux leçons d'anatomie, l'étudiante propose un bout de cassette, sur un thème de Burt Baccarach.  C'est le premier contrat. Isabelle Morizet devient Karen Cheryl ; et grâce à un travail acharné, conquiert un public qui la porte aux sommets des hit-parades. Plus qu'une voix, c'est un look qui accroche : silhouette longiligne, physionomie piquante, sourire enjôleur, cils interminables, façon poupée Barbie, et l'immuable queue de cheval, aux reflets dorés, adoptée au lycée. Aujourd'hui, Karen Chouze est toujours fidèle à cette première image. Succès oblige.


Pourtant son profil de chanteuse ne la satisfait pas complètement. Elle qui se définit volontiers comme un « esprit passionné, curieux de tout, dynamique et surtout créatif », ne tient pas en place, s'intéresse à mille choses en dehors de son métier, et sent mûrir au fond d'elle-même des souhaits et des exigences, pas toujours en accord avec sa maison de disques.


Son premier film « J'ai rencontré le Père Noël succès. Mais elle veut aller encore plus loin. « La télévision est pour cela l'outil de travail privilégié avec lequel il est possible de bousculer sa propre image. A chaque minute il faut être à la hauteur de cet instrument. Défi posé, défi aussitôt relevé, avec la présentation en direct sur TF 1 de l'émission « Destination Noël » « un premier pas », souligne-t-elle.

La chanteuse présentera chaque mercredi sur TF 1 et pendant toute l'année 85, les programmes pour les jeunes téléspectateurs, en concurrence amicale avec Dorothée sur A 2 : « Nous sommes les deux meilleurs amies du monde, et je compte bien l'inviter sur Vitamines. Elle ajoute à propos de l'émission : « Il faut trouver un ton nouveau, des idées nouvelles, sans bouleverser la grille des programmes traditionnelle qui plaisait à nos jeunes amis. Et c'est très excitant. »


Rayonnante, elle est heureuse et soulagée d'interpréter, derrière les caméras, un personnage d'animatrice qui lui plaît. « C'est un rôle qui correspond à ce que je suis dans la vie. » L'année 85 sera donc l'année de Karen à la télévision. « L'année des changements », avait-elle annoncé.


M.-J. V.


La guerre des boutons !

Ciné revue – 22 janvier 1985

Devenue animatrice sur TF1 de l’émission « Vitamine », Karen Cheryl est entrée en concurrence directe avec Dorothée qui anime « Récré a2 » sur antenne 2. Une concurrence qui ravit les enfants car, désormais, le mercredi après-midi, ils ont droit à mille surprises en passant d’une chaîne à l’autre de 13hr40 à 16hr50. Leur après-midi s’est allongé ! Chanteuse et vedette de films, Karen Cheryl ignorait qu’en ajoutant ainsi une corde à son arc, elle entretiendrait une « guerre des boutons » très sympa !


Les après-midis à la loupe

Le Figaro – 1er février 1985

Il faut beaucoup de bonne volonté pour s'installer trois après-midis de suite devant son petit écran. Mais ne serait-ce pas le meilleur des somnifères ?


Regarder trois jours durant les après-midis télévisés relève tour à tour du masochisme et de la psychiatrie avec, de-ci, de-là, quelques plages pacifiques, voire agréables. Question-bilan de ces trois demi-journées passées devant le petit écran : la télévision (parlons plus exactement de TF 1 et d'A 2) s'adresse-t-elle essentiellement aux retardés mentaux, aux retraités proches du gâtisme, aux enfants atteints de dyslogie ?


Premier jour : lundi 28 janvier
Tandis que, sur TF 1, l'agent secret Sloane, trop bronzé pour être honnête, vole d'enquête en enquête et de bras féminins en bras féminins, en tentant vainement de ressembler à James Bond, Aujourd'hui la vie, sur A 2, poursuit son bonhomme de chemin, proposant sans discontinuer des reportages ou des débats publics réguliers et ouverts. Le thème du jour, les bénévoles, met en scène toute une série de mini-reportages intéressants sur les Portes ouvertes et autres Fondations comme celle de Claude : Pompidou. De quoi avoir quelques bons présages pour la suite de la journée ! Mais il faut toujours qu'un feuilleton américain s'en mêle à Sloane, de TF 1, vient répondre à 14 h 50, sur A 2, Magnum, une histoire d'agent musclé et de femmes perfides.
Encore !... L'essentiel des lundis de TF 1 se partage entre La Maison de TF 1 (souvent bien banale) et Les Choses du lundi de Jean Bertho et François Chesneau. Quelques extraits de la conversation dont Fernand Berthou, horloger mécanicien du roi (1727-1807), est le centre : « C'était quelqu'un de formidable, Fernand Berthou, répète Jean Bertho... Ah ! le beau mouvement d'horlogerie !... Il va venir sur l'image (mais il ne vient jamais) ... Une heure quinze sont ainsi consacrés aux « beaux mouvements » d'horlogerie de Fernand Berthou dont on ne voit guère les détails à l'antenne.
Pour le téléspectateur fatigué, vient ensuite le temps des rediffusions, toutes chaînes confondues. Quel est le prétexte invoqué par les chaînes ? Redonner leur chance aux émissions dont la programmation est tardive. Or il s'agit sur A 2 de Thé dansant qui passe le dimanche (la veille) à... 16 h 15, et d'Apostrophes qui passait le vendredi précédent à 21 h 35. TF 1 rediffusait, quant à elle, Sept sur sept proposé le dimanche précédent à... 19 heures. Faux Prétextes qui masquent mal la triste vérité : il faut à tout prix faire des économies.
A 2 propose ensuite sa plage enfantine dès 17 h 40 tandis que TF 1 donne La Chance aux chansons, de Pascal Sevran, avec hommages plus ou moins émouvants à la chanson française et de la musique de qualité. A l'heure enfantine (18 heures), celle de Nounours, il est temps de lever le pied.


Deuxième jour : mardi 29 janvier
Déjà l'habitude s'installe face à l'ineffable Sloane, agent spécial de TF 1, le non moins immarcescible Magnum d'A 2. Seul changement de programme notable en ce second jour de pénitence : la nouvelle émission de TF 1 « Modes d'emploi » qui, avec maladresse mais générosité, tente de parler de la crise de l'emploi et d'aider les chômeurs à lutter pour trouver un travail. Une émission utile, nécessaire, quoiqu’encore balbutiante. Autres balbutiements plus évidents encore sur A 2 pour Le Journal d'un siècle de Louis Bériot : décor trop sévère et chansons qui tentent d'égayer non sans mal une émission sévère et lente. Mais le moment le plus pénible demeure la rediffusion de L'Aventure spéléologique sur TF 1 à 16 h 30, avec un commentaire prétentieux et calamiteux sur les Papous dans « l'inextricable fouillis végétal » et autre « duel entre l'eau et la roche ». L'affliction est totale. Mieux vaut Nounours ou Georgette Lemaire, invitée de Pascal Sevran pour un hommage à qui ?... Vous avez gagné, à Piaf. Quelle imagination !


Troisième jour : mercredi 30 janvier
Il faudrait en ce jour céder la place à un enfant extrêmement jeune pour faire la critique de Vitamine sur TF 1 ou Récré A 2, sur A 2. Karen Cheryl, depuis qu'elle a joué les bonnes fées au cinéma, ne sait plus parler sans minauderies, qu'elle imagine nécessaires à la compréhension du premier âge. Mieux vaut encore Dorothée, Jackie et Cabu sur A 2. Startrek, excellente série américaine, est encore une rediffusion mais comment ne pas céder au charme de Spock, le héros aux oreilles en biseau nettement préférable aux Sloane et Magnum déjà cités (sur TF 1 à 16 h 40). Gavés de dessins animés de toutes les nationalités, nos petits amis peuvent aller dormir en paix, abrutis qu'ils seront de Latulu et Tireli, des Krostons, de Madame Pepperpot. Les Carnets de l'aventure parleront alors sur A 2 de... spéléologie (comme hier), à croire que les Français ne pensent qu'à ça !
Trois après-midi ainsi suivis à la loupe laissent une impression de vide et de dérision. On ouvre trop généreusement l'antenne à des émissions en studio où le débat (si bon marché) s'éternise. Mêmes arguments pour les rediffusions. Quelle épreuve !


Christine FERNIOT.


« Je ne suis pas la rivale de Dorothée »

L’Yonne républicaine – 7 février 1985

La rivalité continue entre TF1 et Antenne 2. TF1 vient de marquer enfin un point pour l’heure essentielle de 19hr45 précédent immédiatement le journal télévisé, en engageant Collaro qui fait à peu près jeu égal avec Philippe Bouvard. Malheureusement Collaro ne continuera plus très longtemps sin « Cocoricocoboy » qui réclame un énorme travail de d’imagination et de création, alors que Bouvard peut se contenter d’improvisation des jeunes comédiens de sa troupe.

TF1 et antenne 2 sont également en compétition lors des importantes émissions enfantines du mercredi dans le combat de « Récré A2 », contre « Vitamines », la deuxième chaîne possédait en Dorothée un atout de poids. Difficile de trouver une animatrice qui sache parler aux enfants avec intelligence, humour et complicité, qui chante fort bien et dont la bonne humeur n’apparaît jamais truquée. Tf1 pense avoir déniché l’oiseau rare en engageant Karen Cheryl.

Karen, elle aussi, chante bien, et pour cause, c’est son métier, mais jusqu’ici son répertoire s’adressait à un public plus âgé que celui de « Vitamines ». Elle est incontestablement fort jolie et a perdu en vulgarité et gagné en charme depuis deux ans. Elle vient de faire ses débuts de comédienne à l’écran dans le film de Christian Gion « J’ai rencontré le Père Noël » et a joué très adroitement, avec beaucoup de spontanéité, enchantant même dans son personnage de fée les enfants américains puisque pendant les fêtes de Noël le film a été présenté chaque après-midi dans 1000 salles aux Etats-Unis.

Pendant toute l’année, Karen va donc présenter « Vitamines », chaque mercredi après-midi, et l’expérience l’intéresse.

« Ce n’est pas la première fois que j’apparais au petit écran, explique-t-elle, puisque j’ai déjà joué il y a deux ans dans « L’inspecteur mène l’enquête » et participé à une émission sur « La Révolution française ». Il n’a jamais été dans mes intentions de faire seulement une carrière de chanteuse. Là, il va s’agir de présentation, donc d’improvisation, de communication à faire passer à travers l’écran. Je participe aussi à la fabrication des programmes en discutant, en apportant mes idées. Et puis, je danse, je chante, je joue la comédie. Que l’on soit animatrice dans les émissions pour enfants ou dans les émissions pour grandes personnes, c’est toujours le même métier, il faut avoir du rythme. »

Le rythme, Karen Cheryl le possède depuis longtemps puisqu’elle a appris la batterie avec Keny Clarke et se trouve toujours à l’aise devant les tambours. Elle dessine aussi fort bien. Cela l’agace toutefois que l’on veuille l’opposer à Dorothée : « C’est une de mes amies et on ne va pas se brouiller parce qu’on devient concurrentes, puisqu’il s’agira d’une concurrence amicale et non d’une rivalité. D’ailleurs, si la chaîne est d’accord, Dorothée viendra chanter dans mon émission, et je suppose qu’elle parlera de mes disques dans la sienne. »

La clientèle enfantine, qui était chasse gardée de Chantal Goya et de Dorothée (plus accessoirement, Carlos et Annie Cordy), devient donc de plus en plus recherchée. Il faudra, sans doute, aussi compter avec Douchka qui bénéficie du soutien de Walt Disney.

Karen Cheryl, quant à elle, compte bien intéresser les enfants avec « Vitamines », avec des chansons et, à nouveau, le cinéma. Christian Gion l’a déjà retenue pour un autre conte de fées filmé : « Cendrillon ».

René QUINSON


Vitamine matin contre Récré A2 matin

Télé Star - 1985

Le 27 mars dernier, Antenne 2 lançait « Récré A2 matin ». Sur TF1, la réplique ne se faisait pas attendre. Le 17 avril, la « Une » proposait à son tour un « Vitamine » matinal. Avec des ingrédients quasi identiques à ceux de l'après-midi (dessins animés, mini-reportages, chansons), ce duel qui oppose Dorothée à Karen Cheryl a pour arbitres les enfants. Nous en avons interrogé quelques-uns.


Que pensent les enfants de leurs émissions? Pour le savoir, nous avons réuni dix enfants de cinq à dix ans, auxquels nous avons projeté les programmes du matin. Le mercredi 22 mai, ils ont regardé Antenne 2, le 29 mai TF1. Nous leur avons demandé de noter chaque séquence de 0 à 10 et de nous donner leurs impressions. En aucun cas, leurs réponses n'ont valeur de sondage «officiel » mais leur témoignage est intéressant.

Globalement, les enfants apprécient les émissions proposées par les deux chaînes. A cela près qu'ils avouent une certaine préférence pour « Récré A2», à cause notamment de son animatrice. Dans leur cœur, Karen Cheryl n'a pas réussi à détrôner Dorothée. «Elle est plus sympathique », disent-ils de cette dernière, et lui accordent 9/10 contre 7/10 à sa concurrente. «Karen n'est pas assez naturelle. Trop sophistiquée» (Alix, 8 ans et demi). « Elle parle trop vite » (Romain, 7 ans et demi). «Elle gesticule sans cesse. On dirait le tennisman suédois, vous savez, Carlsson» (Juan Manuel, 9 ans).


En ce qui concerne les programmes, le 22 mai, Antenne 2 proposait ses émissions habituelles. Dans l'ordre: «Judo boy», «Tchaou et Grodo», « Pacman », « Johan et Pirlouit», «Discopuce », « Albator >> et « Buster Keaton ». Une prédominance de dessins animés qui ravit les enfants. « Je les aime tous », (Céline, 7 ans). « Je les aime tous sauf "Pacman"», (Laetitia, 9 ans). « Je n'aime pas du tout "Tchaou et Grodo"», (Mathieu, 7 ans).

Si les petits ont tendance à préférer « Johan et Pirlouit» - «C'est mignon » (Marine, 5 ans) - les plus grands accordent leurs suffrages à «Judo  boy» et - c'est une surprise - à Buster Keaton, mini-film muet diffusé en noir et blanc. «Judo boy", je l'aime parce qu'il est fort» (Alix, 8 ans et demi). «Il y a beaucoup plus d'action que dans les autres dessins animés» (Vincent, 10 ans). «Buster Keaton", c'est extra, répondent-ils unanimes. C'est drôle. Que de gags! Le noir et blanc ? C'est sympa et... nouveau!» Pas de cadeau en revanche à «  Discopuce ». Détestant cette séquence, ils lui infligent un zéro sans appel. Romain (7 ans et demi) résume leur commentaire : « C'est nul »
Le 29 mai, TF1 diffusait « Tofffsy », dessin animé, «Les petits creux de Loula», une séquence courrier, «Tennis club » (un dessin animé documentaire), puis une chanson interprétée par Karen Cheryl. Hormis Céline, 7 ans, qui adore « Tofffsy », les autres préfèrent nettement «Tennis club » et «  Loula», qui leur livre ses secrets culinaires et leur apprend le bricolage. «Traité avec humour "Tennis club" est aussi instructif » (Vincent, 10 ans). "Loula" nous l'aimons bien, répondent-ils d'une même voix. Elle est amusante et nous enseigne des tas de choses. » « L'intérêt est irrégulier.» (Christophe, 10 ans et demi). «Maman ne l'aime pas, elle la trouve vulgaire. C'est vrai, mais ce n'est pas grave» (Sonia, 10 ans). Quant au téléfilm, qui, répétons-le, n'est pas intégré aux programmes pour la jeunesse, ils l'estiment tous « intéressant » et le suivent assez régulièrement.

LE SONDAGE AUDIMAT DU 22 MAI 1985
A titre d'exemple, voici le sondage Audimat pour les émissions du 22 mai sur les deux chaînes.
TF1: A 9h 15, 4,4 et 7,3 à 9h 50.
Antenne 2: 7,4 à 10 heures pour terminer à 10 h 50 avec 9,5.


LEURS NOTES (EN MOYENNE) - TF1
Toffsy 5
Les petits creux de Loula 7.5
Tennis club 9


LEURS NOTES (EN MOYENNE) - ANTENNE 2
Judo boy 8
Tchaou et Grodo 6.5
Pacman 5.5
Johan et Pirlouit 6
Discopuce 0
Albator 6
Buster Keaton 8.5


JACQUELINE JOUBERT
RESPONSABLE DES PROGRAMMES POUR LA JEUNESSE A A2:
«UNE EMISSION DIFFERENTE ET COMPLÉMENTAIRE ».
■ TÉLÉ STAR: Pourquoi avoir créé « Récré A2» le matin?
JACQUELINE JOUBERT: C'est une décision de la direction d'Antenne 2. Cette émission est à la fois complémentaire et différente de celle de l'après-midi. J'ai voulu montrer une autre facette de Dorothée. L'après-midi, elle est plus ou moins prise dans un carcan. J'ai voulu que le matin, elle s'exprime en totale liberté, telle qu'elle est dans la vie. C'est pour cela qu'elle effectue des reportages au jardin d'Acclimatation ou dans les musées, et qu'elle reçoit des invités. Ainsi, elle peut improviser. C'est très sympathique et très télégénique.

■ On le sait, les enfants sont avides de télévision. Avec cette émission, n'avez-vous pas peur de créer un besoin supplémentaire? En un mot, ne faites-vous pas de la télévision une sorte de baby-sitter?
Non, j'ai toujours dit que nous n'étions ni l'école, ni la famille, ni la baby-sitter. Nous offrons un divertissement. Il ne faut pas oublier que nombreux sont les enfants qui souffrent de solitude. Je pense souvent à eux, peut- être parce que moi-même j'en ai été victime, enfant. Alors, si nous pouvons leur apporter un peu de joie, rien que cela est positif. Et puis, certaines de nos séquences sont instructives.


JACQUES MOUSSEAU
RESPONSABLE DES PROGRAMMES POUR LA JEUNESSE A TF1:
<<NOUS N'AVONS FAIT QUE REAGIR».
■TÉLÉ STAR: En proposant « Vitamine » le matin, avez-vous voulu contrer Antenne 2?
JACQUES MOUSSEAU: Pas tout à fait. Nous ne voulions pas spécifiquement opposer « Vitamine » à «Récré A2 matin ». Notre réplique s'est inscrite dans une politique globale.
Souvenez-vous, nous étions en période de guerre des chaînes, comme on l'a dit un peu excessivement. Cette « guerre » s'établissait tous azimuts: soirée, film, etc. Aussi, la direction de TF1 a-t-elle décidé de réagir également à travers ses émissions pour la jeunesse.


On a tout de même l'impression d'assister à un duel? N'est-ce pas votre avis?
Je dois préciser que ce qui a véritablement motivé notre décision, c'est la diffusion d'un film en tout début d'après-midi sur Antenne 2. Un film tout public, mais séduisant en priorité les jeunes. Le tout premier était «Ivanohé », destiné à drainer des enfants vers « Récré A2 ». La deuxième chaîne nous a d'ailleurs distancés dans les sondages. 15% contre 8%. C'est pour cela que nous n'avons pas hésité à lancer un «Vitamine » le matin.

Débuter à 9h 15, n'est-ce pas un peu tôt ?
C'était un pari calculé. Il faut savoir qu'à la suite de la diffusion sur Antenne 2, dans «Télématin », d'un dessin animé à 7h55, des études ont prouvé que certains enfants récalcitrants se levaient plus facilement afin de ne pas manquer ce dessin animé. En ce qui nous concerne, le résultat a dépassé nos espérances. A 9h 15, les sondages nous donnent en moyenne 5% d'audience et 7% à 9h50.


Le téléfilm diffusé après «Vitamine» fait-il partie des émissions pour la jeunesse ?
Du tout. Il n'est pas choisi par notre unité de programmes. Mais il est évident qu'il est complémentaire.

En proposant vous aussi des émissions enfantines le matin, n'avez-vous pas l'impression de créer un besoin?
C'est un problème délicat. On propose, le téléspectateur dispose. Il appartient aux parents de décider.


Le duel du mercredi : Dorothée bat Karen

Médias – 14 mai 1985

Dans le grand match des vedettes TV des enfants, Dorothée (Antenne 2 ; 8 %) bat légèrement Karen Cheryl (TF1 ; 7 %). Leur opposition n'est pas frontale. L'après-midi du mercredi, Karen Cheryl officie entre 13 h 30 et 15 h 20. Dorothée prend le relais entre 15 h 20 et 18 h. Les deux jeunes femmes s'opposent surtout en tant qu'image enfantine de leur chaîne.
Dorothée fut d'abord speakerine avant d'animer Récré A2 et de chanter. Karen Cheryl a longtemps fait danser les midinettes avant de négocier un virage habile (grâce au film J'ai rencontré le Père Noël) vers un auditoire encore plus jeune. Avec Douchka (Disney Channel de FR3), elles sont trois à assurer ainsi une synergie entre leurs ventes de 45 tours et leur audience télé.
Les émissions Vitamine et Récré A2 sont constituées à partir d'un cocktail de dessins animés et de séries américaines. Les deux animatrices sont là pour apporter une présence identifiable aux enfants dans le déluge des images.

Avant janvier, TF1 ne possédait pas d'animatrice attitrée pour ses mercredis après-midi. Le Pdg de TF1, Hervé Bourges, pouvait difficilement admettre qu'Antenne 2 ait le monopole du cœur des gosses. Il a donc embauché Karen Cheryl. Quand Jean-Claude Héberlé a placé Dorothée sur la tranche du matin en mars dernier, Hervé Bourges a immédiatement répliqué en programmant aussi une première partie de Vitamine à neuf heures et demie. C'est donc toute la journée qu'elle se disputent maintenant l'attention des enfants. L'enjeu est la conquête d'un public mineur par l'âge mais majeur par l'efficacité de ses prescriptions. Une étude réalisée dans le cadre de la préparation du câblage de la Ville de paris a démontré que le choix d'un programme TV ne résultait pas de son propre désir mais du souci de faire plaisir aux autres membres de la famille qui regardent la télé. Dans cette logique, les enfants sont essentiels. Ce sont eux avant tout qu'il ne faut pas exclure. D'autant qu'ils constituent un marché commercial spécifique qui intéresse de nombreux annonceurs (jouets, jus de fruits, friandises).